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De la première photo au milliard d'heures de film consommées chaque jour sur le Net, ce tourbillon d'archives déroule en accéléré deux siècles d'images pour sonder les mutations engendrées par la prise de vue "réelle". Un miroir aussi hilarant que dévastateur tendu à l'humanité.
"Quelle machine extraordinaire que la caméra, s'exclama joyeusement, paraît-il, le roi Édouard VII en découvrant en 1902 la reconstitution filmée de son couronnement commandée au Français Georges Méliès. Elle permet même d'enregistrer des aspects de la cérémonie qui n'ont jamais eu lieu !" Bien avant, en 1828, Nicéphore Niepce avait inventé le moyen de "dessiner avec la lumière" (l'étymologie du mot "photographie") grâce à une chambre noire. Près de deux cents ans plus tard, dans le premier quart du XXIe siècle, des livestreamers boostent leur audience en dormant devant une caméra allumée, tandis que 500 heures de vidéo, capturées par quelque 45 milliards d'appareils de prise de vue dans le monde, sont publiées en ligne à chaque minute. Entretemps, au tout début de ce siècle, Patrick Le Lay, encore un Français inventif, aura formulé la théorie dite du "temps de cerveau humain disponible" (et rentable). Peu après, une chute malencontreuse à domicile faisait de Paige Reynolds, chanteuse amateur américaine, la réalisatrice et l'héroïne de la première vidéo virale de l'histoire du Net. Quelle humanité ces deux siècles d'images, et surtout, ces vingt ans de fuite en avant numérique, sont-ils en train de façonner ? Il semble que le génie sorti de la camera obscura nous entraîne surtout vers le pire, de la course au scoop (terrifiant contre-champ des téléobjectifs braqués sur le cadavre d'une adolescente haïtienne tuée dans le séisme de 2010) à l'accélération vertigineuse et incontrôlée de flux d'images émises, manipulées, partagées par des sources innombrables. Il s’agit désormais de remporter la mise dans une "économie de l'attention" carburant à la dopamine.
Pêcheurs de perles
Pour Axel Danielson et Maximilien Van Aertryck, la dépendance collective indiscriminée engendrée par "l'extraordinaire machine" menace aujourd'hui directement la survie des libertés démocratiques. Mais les réalisateurs préfèrent laisser les spectateurs tirer leurs propres conclusions en les faisant rire. Ce duo réputé pour la drôlerie de ses documentaires anthropologiques pêche depuis des années des petites perles dans la marée incessante d'images déversée sur les écrans du monde. Assemblées dans ce cocktail aussi dévastateur que jubilatoire - dont on retrouve parmi les producteurs le cinéaste Ruben Östlund (Sans filtre, The Square, Snow Therapy...) –, elles tissent le beau et le monstrueux, le burlesque et le tragique, l'incroyable et le jamais-vu pour susciter d’un même mouvement la réflexion et le plaisir.
Le parcours d’un journaliste de la presse à sensation dans la jungle romaine, faune bigarrée en agitation constante. Un film sensuel et désarçonnant, une œuvre totale dans laquelle Fellini concentre certaines de ses obsessions.
Marcello, chroniqueur mondain, sillonne Rome à la recherche du scandale et du sensationnel. Toujours entouré d’une nuée de paparazzi, il fréquente avec détachement les lieux où se presse la foule…
L'ambiguité
Comme l’a lui-même raconté Fellini, une image est à l’origine de La dolce vita : celle d’un style de robe qui était à la mode à la fin des années soixante. Un vêtement élégant mais coupé d’une façon qui dissimulait le corps féminin. Quelle créature se trouvait à l’intérieur ? Était-ce un être plein de vie et pur, comme son apparence pouvait le faire penser ? Ou bien un squelette rongé par le vice et la solitude ? Pour filmer la réalité, Fellini en filme l’idée, le rêve. Il le fait avec une ferveur et un investissement proches du sentiment religieux. Mais il ne se revendique d’aucune chapelle. Avec La dolce vita, il rompt les amarres qui l’attachent à l’école néoréaliste. Pour lui, les maîtres sont du côté de Jung et de Buñuel, du décryptage des pulsions contradictoires et de la surréalité qui en dit long sur le monde dans lequel nous vivons. Sans préjuger des mœurs observées, Fellini agit en moraliste. La décadence l’obsède, mais il ne la met pas sur le compte de son époque – et ne propose pas non plus de remède. En dépit d’Anita Ekberg, naïade inattendue de la fontaine de Trévi, et malgré l’agitation mondaine des fêtes qui se succèdent, le film tend à l’immobilité. "Je prends la température d’un monde malade ; mais si le mercure indique 40 °C au début du film, il en indique également 40 à la fin. Rien n’a changé." Les personnages répètent les mêmes actions, s’enferrent dans des modes de fonctionnement. À force d’en avoir trop vu, ils regardent sans voir, tel, à la fin du film, l’atroce poisson échoué sur le rivage qui contemple d’un œil morne l’immensité du ciel.
Palme d'or du Festival de Cannes 1960