Cet album est le fruit de la rencontre entre Salif Keita, ambassadeur de la musique malienne depuis plus de quarante ans, et Philippe Cohen Solal, music producer qui a fait le tour de la planète avec Gotan Project depuis plus de dix ans. Ils se sont posés à Bamako, au studio Moffou, histoire d'accoucher des bases de l'album. De prestigieux invités donnent la réplique à Salif Keita. Avec le Camerounais Manu Dibango, le grand pair de l'afro-funk s'insère sur deux titres. Bobby McFerrin improvise un dialogue avec Salif Keita transformé pour l'occasion en beat-boxer, autour d'une douce mélodie jouée au simbi, l'ancêtre à sept cordes de la kora. Esperanza Spalding dialogue également avec Salif sur ''Chérie s'en va'', une chanson dédiée aux jeunes filles qui quittent le foyer pour se marier. Et enfin, le Londonien Roots Manuva pose son flow sur ''C'est bon c'est bon'', une production à la Lee Perry, du rock steady surspeedé, avec infrabasse botoxée et choristes chaloupées. Pas de doute, l'aventure mène vers des horizons pour le moins inédits : au détour d'un accent d'une calebasse, on croise le disco des seventies ; l'afro-beat poisseux se retrouve sur les rives polluées de Detroit, la pulsation historique de la techno ; ailleurs, les sons du guembri et des qraqebs gnaouas Tout un symbole de ce disque qui vous met la tête à l'envers histoire de remettre au bon endroit papa Keita.

Ce 5ème album a été réalisé par John Parish. Rokia Troaré y a rassemblé un noyau musical malien, un contingent d'instrumentistes européens ainsi qu'un beatboxeur australien.

''Afrocubism'' concrétise l'idée d'origine du Buena Vista Social Club : un retour aux sources entre Cuba et le Mali. En 1996, Nick Gold, patron de World Circuit met sur pied un ''super groupe'' de musiciens cubains et maliens qui doivent enregistré à La Havane. Mais pour une question de passeports perdus, les Africains n'arriveront jamais à bon port, et les Cubains enregistrent donc seuls le disque ''Buena Vista Social Club''. En 2010, Nick Gold a finalement réussit à concrétiser son projet avec les musiciens prévus à l'origine, avec en plus une brochette de stars cubaines et africaines. A la tête de l'équipe cubaine figure Eliades Ochoa. Les 2 figures de proue du Mali sont Bassekou Kouyaté et Djelimady Tounkara. Ils sont accompagnés du Grupo Patria Eliades, de Toumani Diabaté, de Kasse Mady Diabaté et Lassana Diabaté. Le titre de l'album est parlant : la musique ressemble à une toile moderniste d'où jaillissent des éléments cubains et africains qui s'entrelacent pour former une fresque ensorcelante.

Ali Farka Touré a parcouru le monde, faisant découvrir la musique malienne à tous. Il est surnommé "le John Lee Hooker africain" et on entend en effet des liens étroits entre les deux. Tous deux ont utilisé un style de jeu bluesy aux textures granuleuses, qui suscite à la fois le calme et la fureur. Touré créait un mélange ouest-africain de "blues du désert", qui lui a valu de remporter un Grammy Award, ainsi qu'une vénération internationale. Bien qu'il soit décédé en 2006, l'héritage musical d'Ali se perpétue à travers son fils, Vieux Farka Touré, alias "le Hendrix du Sahara", un guitariste accompli et une véritable star de la musique malienne. Sur Ali, son album collaboratif avec Khruangbin, Vieux rend hommage à son père en recréant certaines de ses oeuvres les plus emblématiques, en y apportant de nouveaux rebondissements, qui ne nuisent en rien à l'intégrité des originaux. Le résultat est une véritable ode à une légende. Ali n'est pas seulement une compilation des plus grands succès de l'artiste. C'est une berceuse, un souvenir de la vie d'Ali à travers des temps forts et des faces B de sa discographie. C'est un témoignage de ce qui arrive quand la créativité est abordée à bras ouverts et à cœur ouvert. L'album a été commencé en 2019, quand Khruangbin venait de sortir le révolutionnaire Con Todo el Mundo, et a été terminé en 2021 en pleine pandémie mondiale. Indirectement, Ali capture cette période et en fait un moment de paix dans une tempête déchaînée, une conversation entre passé et présent, qui ne prête toutefois pas allégeance à la souffrance. Ali est une oeuvre magistrale dans laquelle l'amour qui l'entoure est tout aussi important que la musique elle-même. Vieux Farka Touré et Khruangbin transmettent la bonne parole à une toute nouvelle génération.